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Le principe d'incertitude en historiographie

Louis Carolus-Barré (1976) remarque qu'à l'époque de Louis IX, de rares actes adressés à des administrations territoriales du nord-est de Paris, ou les traités diplomatiques adressés aux Plantagenêts, sont rédigés en langue vulgaire et le Roy de France n'y apparait que comme traduction de Francorum Rex :

"Ailleurs, dans la Douce France chantée par les poètes, c'est plus tardivement et de façon plus ou moins sporadique que l'on rencontre des actes en langue vulgaire, dans l'énorme masse des documents rédigés traditionnellement en latin.

La plupart de ces actes, encore assez peu nombreux, émanent d'échevinages urbains (ex. : Douai, Tournai, Metz -) ou bien de seigneurs de petite ou moyenne importance : chevaliers, écuyers, — parfois même (mais plus rarement) d'une autorité ecclésiastique."

https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1976_num_120_1_13222

"Dans cet ensemble rédigé en langue latine, il m'est arrivé — alors que depuis de longues années je m'attache à rassembler les actes de Louis IX — de trouver quelques actes en langue vulgaire : tel mandement adressé en picard au maire féodal de Clermont-en- Beauvaisis (1255), deux autres à la commune de Montreuil-sur-Mer (1255, 1257), une dizaine d'autres encore adressés aux gardes de la forêt de Retz (auj. Villers-Cotterêts) (1227-1258), — mais le texte de ces divers documents est conservé seulement en copie, et l'on n'a pas de mal à déceler qu'il s'agit de traductions faites sur des originaux rédigés en latin."

https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1976_num_120_1_13222

Ce dernier commentaire sur le style si particulier et immédiatement identifiable de la traduction au mot à mot, s'il satisfait les exigences des "spécialistes" en littérature, n'en laisse pas moins découvrir un seuil infranchissable en terme de connaissance directe.

Dans un article publié par la bibliothèque de l'Ecole des chartes en 1885, à propos de la formule "vir inluster", Julien Havet écrivait toute la méfiance envers des copies erronées :

" De là les nombreuses copies des chartres mérovingiennes et les formules postérieures (sans parler des actes faux) qui nous sont parvenues avec la leçon rex Francorum "vir inluster", au lieu de "viris inlustribus", et qui ont accrédité cette leçon jusqu'aujourd'hui parmi les diplomatistes. Je crois qu'il faut considérer ces mots, quand on les trouve dans un texte mérovingien, comme introduits par une faute de copie, et qu'on ne doit pas hésiter à les corriger. p149

https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1885_num_46_1_447336

Puisque que les copies et les traductions s'accumulent, l'erreur du copiste est devenue un principe d'incertitude incontournable. A l'image d'une rationalité physique, se pliant à l'exigence positiviste de la preuve et se résolvant à adopter l'idée d'impossibilité de mesure simultanée de la vitesse et la localisation d'une particule (principe d'incertitude d'Heisenberg) et concluant au principe de "non localisation", la rationalité historique doit exiger, par principe positiviste, la preuve historique de l'existence d'un document afin d'en supposer la datation. 

Face à la possibilité systématique de présence de l'erreur, la connaissance directe de l'historien doit admettre que la copie ne fait foi que d'elle même, elle ne prouve en aucun cas l'existence de l'acte copié.

En 1888, Elie Berger résumait ce principe fondamental, en constatant que (à propos des Actes de Louis VII): "Ces lettres, que nous ne possédons plus sous leur forme première, ne prouvent rient contre les actes authentiques."

https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1884_num_45_1_447246

L'histoire extra-subjective exige de n'admettre aucune datation antérieure à la copie. L'esprit s'accorde aisément à appliquer ce principe devant l'existence supposée d'Hugues Capet Francorum Rex. Même si une grossière représentation du sceau prétend copier un original supposé, le style totalement incohérent laisse deviner une simple invention du copiste.

L'application généralisée et systématique de ce principe positiviste se révèle capable de révéler des cohérences significatives insoupçonnées. 

La série expérimentale observée par Louis Carolus-Barré...

La plupart de ces actes, encore assez peu nombreux, émanent d'échevinages urbains (ex. : Douai, Tournai, Metz -

...devient une série particulièrement signifiante...dans le cadre de la conquête de la Lorraine, de la découverte du tombeau de Childéric et la construction de la narrative mérovingienne. 

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Les papyrus mérovingiens des Archives nationales

Les papyrus des Archives nationales: quelques chiffres

 • 13 actes royaux mérovingiens originaux (625-v. 679), souvent fragmentaires.

Mais aussi:

• 4 actes « privés » mérovingiens (VIIe s.), dont deux copies « certifiées conformes » de testaments;

• 3 documents pontificaux: une lettre d’Adrien I er (788), deux privilèges, l’un de Nicolas I er (863), l’autre de Formose (893);

• 1 lettre fragmentaire d’un empereur byzantin (827 ou 840/842).

Sans oublier:

• Les Archives nationales conservent aussi des actes faux réalisés à partir de papyrus « recyclés » (presque tous produits à Saint-Denis)

https://www.college-de-france.fr/sites/default/files/documents/jean-luc-fournet/UPL1322102765605427775_Morelle_papyrus.pdf

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Cet extrait de l'encyclopédie Wikipédia permet d'observer comment la pensée commune de l'idéologie, refusant l'exigence positiviste, ne prétend ni s'astreindre au principe de non contradiction ni même à celui de la tautologie :

Une charte de 523 émanant de Sigismond, roi de Bourgogne, mentionne la donation de la seigneurie de Bracon et d’une partie des terres salinoises à l'abbaye d’Agaune-en Valais. Bien que son authenticité soit douteuse, ce document comporte la plus ancienne mention du nom de la ville qui nous soit parvenue.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Salins-les-Bains

Si l'authenticité du document et douteuse, le principe de tautologie exige que le contenu du document est douteux. En effet, si l'authenticité du document n'avait pas été douteuse, on aurait pu affirmer qu'il eut comporté la plus ancienne mention de la ville...mais, puisque son authenticité est douteuse...

...rien ne nous est parvenu...

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1633 - Année terrible pour la Lorraine et le Garde des Sceaux Charles de l'Aubespine, Louis XIII devient Roi de France !

Le premier roi de France, usant d'une nouvelle titulature dans la légende d'un nouveau sceau, frappant une nouvelle monnaie et inaugurant une nouvelle période de stabilité monétaire, garantissant l'immuabilité d'une nouvelle langue, grâce à la nouvelle Académie Française qu'il fonde en 1635, prendra également grand soin de donner un nouveau nom au territoire conquis sur lequel il étend sa nouvelle autorité de vainqueur.

Tous ces effets observés dans tant de domaines différents, s'imposent à l'esprit dans leur cohérence mutuelle insérée dans une  logique causale.

Ces observations poussent naturellement à se demander si une ordonnance ou une monnaie ornée d'une légende se référant à un Roi de France avant le coup d'Etat du 25 février 1633, ne serait pas un faux. Il n'est surtout pas à exclure que le second Louis XIII lui-même, soit à l'origine de la diffusion des premières contrefaçons.

https://www.fr-tul.cz/clanky/histoire-de-france/1633--annee-terrible--.html

 

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