L'Alsace de 1450, Rabelais (1540), Marie de Médicis et les Etats généraux de 1614...
Les confirmations de l'influence et de la présence africaine tardive en Europe
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Tapestry: Wild Men and Moors
"Ainsi Robert Cousin cherche-t-il la vérité de ses origines, « une vérité qui, selon lui, avait été sciemment occultée au long de treize siècles d’histoire, la fondation sarrasine étant, pour les détenteurs du pouvoir religieux ou politique, inacceptable » (p. 218). "Basset Karine-Larissa, Le légendaire sarrasin en France (configuration et histoire d’un contre-récit national, XIXe-XXe siècles). 2006.
https://journals.openedition.org/remmm/5613
Puisque de nombreux documents semblent confirmer la théorie de Robert Cousin d'une "vérité occultée au long des siècles (citons notamment la tapisserie alsacienne du 15ème siècle "The wild men and the Moors"), il est certainement possible de trouver des éléments dans la littérature classique venant soutenir cette hypothèse.
Rabelais
Le Gargantua (vers 1540) de Rabelais étaye effectivement l'idée de la prépondérance culturelle africaine sur les territoires européens, et ceux qu'on nomme aujourd'hui la France.
Au chapitre XXXIII, un officier subalterne, tentant de formuler un compliment au petit général Picrochole, construit sa flagornerie par une comparaison flatteuse. Le comparant, archétype de puissance, est africain :
Le Soubdan n'est pas comparable a votre puissance
Le chapitre XVI explique comment Grangousier se fit envoyer une jument suffisamment imposante pour transporter son géant de fils :
En ceste mesmes saison Fayoles quart roy de Numidie envoya du pays de Africque a Grantgousier une jument la plus enorme et la plus grande que feut oncques veue, et la plus monstreuse. Comme assez scavez, que Africque aporte tousjours quelque chose de nouveau.
C'est Fayoles, quatrième roi de Numibie qui lui envoya cette jument, apparemment introuvable en Europe. Rabelais ne manquera de remarquer qu' Afrique apporte toujours quelque chose de nouveau, mettant ainsi l'accent sur le fait que l'Afrique est le centre culturel, à partir duquel rayonne le progrès des sciences et des techniques.
Et fut amenee par mer en troys carracques et un brigantin, jusques au port de Olone en Thalmondoys.
La jument débarquera au port d'Olonne de Thalmondois (près des Sables d'Olonne modernes) dont on dit qu'il devint le principal port en France sous le règne de Louis XI dans les années 1470. Comme ce port s'ouvre sur l'océan Atlantique, force est de conclure que les échanges économiques les plus intenses proviennent de l'ouest.
Mauritanie : le royaume de l'Ouest
Or, ce n'est qu'à partir de 1660 que le port d'Olonne se développera pour devenir le premier port morutier. Il accueillait alors les navires revenant des zones de pêche au large de Terre-Neuve.
Il faut donc en conclure que lors de la première période, s'étendant du XVème au XVIème siècle, que cet ouest porteur de richesse n'était pas les nouvelles Indes.
M. Adolphe Bloch, citant Strabon, rappelle que le premier sème qui se dégage de l'étude étymologique de Maure, est celui de « l'ouest » (de l'Afrique.) Ce n'est que par synecdoque que le sème « noir » est apparu ultérieurement en grec.
Ainsi, la Mauritanie s'entend d'abord comme le Royaume de l'Ouest, faisant face au Royaume de l'Est (Österreich-l'Autriche)
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L'esprit européen moderne s'organise autour de catégories géographiques séparant l'Afrique de l'Europe. En expliquant les motivations du nom Pantagruel ( (le) tout altéré), né à une époque de grande sécheresse qui avait bouleversé le monde, Rabelais en résume la géographie par le seul continent originel :
Mais, pour entendre pleinement la cause et raison de son nom, qui luy feut baillé en baptesme, vous noterez qu’en icelle année fut seicheresse tant grande en tout le pays de Africque que passerent XXXVI moys, troys sepmaines, quatre jours, treze heures et quelque peu dadvantaige, sans pluye...
Pantagruel. Chap.II
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Le problème de la "complexion"
il estoit merveilleusement phlegmaticque des fesses, tant de sa complexion naturelle, que de la disposition accidentale qui luy estoit advenue par trop humer de purée Septembrale. Et n'en humoyt poinct sans cause. Car s'il advenoyt qu'il feut despit, courroussé, faché, ou marry, s'il trepignoyt/ s'il pleuroyt, s'il cryoit, luy aportant à boyre, l'on le remettoyt en nature, & soubdain demouroyt quoy et ioyeux. Une de ses gouvernantes m'a dict, que de ce fayre il estoyt tant coustumier, qu'au seul son des pinthes & flaccons, il entroyt en ecstase, comme s'il goustoyt les ioyes de paradis. En sorte qu'elles considerant ceste complexion divine pour le resiouyr au matin faisoyent davant luy donner des verres avecques un cousteau, ou des flaccons avecques leur toupon, ou des pinthes avecques leur couvercle.
Gargantua. Chapitre. vi.
Mais Gymnaste luy dist Seigneur telle est la nature & complexion des Françoys, que ilz ne valent que à la première poincte. Lors ilz sont plus que diables. Mais s'ilz seiournent, ilz sont moins que femmes.
Gargantua. Chap. xlvi
Depuis, la ville en fut appelée Paris; on l’appelait auparavant Leukèce, comme l’indique Strabon, au livre IV, c’est-à-dire Blanchette, en grec, à cause de la blancheur des cuisses des dames du lieu.
Gargantua, chap. 17
https://rabelaisparlalorgnette.wordpress.com/2019/05/30/comment-paris-fut-nommee-paris-par-ris-a-cause-du-zizi-de-gargantua/
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Les Etats-Généraux convoqués par Marie de Médicis en 1614
« Comme c'est la coutume invétérée entre les princes de la chrétienté d'accompagner les jours gras de quelques réjouissances publiques et d'obliger leurs peuples par des divertissemens agréables, on décida qu'à l'occasion de l'heureuse conclusion des Etats, on danserait un ballet dépassant en somptuosité tout ce qui s'était fait par le passé et ôtât à l'avenir l'espérance de rien faire de même.»
« Le vrai ballet, qui avait nom l’Africaine ou le Triomphe de Minerve, commença : on vit, dans un paysage nouveau, se succéder les plus belles filles de la cour, « habillées à l’antique africaine, mais fort court pour ne point nuire à la danse… »
M. le duc de LA FORGE cité par Gabriel Hanoteaux
https://www.jstor.org/stable/44762708?seq=2
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Louis XIV
Dans les Questions sur l'Encyclopédie (1771), Voltaire écrit que l'homme au masque de fer, un homme de grande taille, comme Louis XIV, qui avait la peau un peu brune comme lui.
in Secrets historiques et grandes énigmes. 2010. P.120
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M. Adolphe Bloch. Etymologies et définitions diverses du mot de Maure. 1903
https://www.persee.fr/doc/bmsap_0037-8984_1903_num_4_1_7671
Histoire sablaise
https://www.lessablesdolonne.fr/culture-patrimoine/archives-municipales/histoire-sablaise/histoire-sablaise/#:~:text=Le%20Port%20des%20Sables%20s,navires%20y%20mouillent%20chaque%20ann%C3%A9e.
François Rabelais
LA VIE TRES HORRIFICQUE DU GRAND GARGANTUA PERE DE PANTAGRUEL.
Jadis composée par M. Alcofribas, abstracteur de Quinte Essence.
Livre plein de Pantagruelisme.
https://www.lire-des-livres.com/gargantua/'