Du Rex Francorum au Roi de France - I
Roman national et documents sigillaires. Du supposé Clovis aux premiers Capétiens.
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«Notre roman national peut-être romancé, exagéré ou fantasmé, mais il est notre roman national. Si on ne partage pas ce patrimoine culturel, on ne partage plus rien. La crise que nous vivons n’est pas celle de l’Histoire, elle est celle de la transmission»
Nicolas Sarkozy - septembre 2016
https://twitter.com/nicolassarkozy/status/1390335709890875397
La loi de 2003 sur l'enseignement qui définit le socle commun de l'enseignement comme le "ciment de la nation" ayant pour but la construction d'une citoyenneté française et européenne.
L'école ciment de la nation
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/capture-d-ecrans/capture-d-ecrans-du-mardi-18-octobre-2022-5844881
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Christiane Taubira, la garde des sceaux sous le gouvernement J.M. Ayrault 2012
L'étude des sceaux royaux,
- définis par Gilbert Cahen, dans le catalogue des sceaux des archives du département de la Moselle, comme
"emprunte sur une matière plastique, généralement de la cire, d'images et de caractères gravés sur une matière dure, pierre ou métal, plus spécialement désigné sous le nom de matrice, mais communément appelée elle aussi le sceau et employée comme signe personnel d'autorité et de propriété"
http://www.archives57.com/images/Inventaires/FRAD057_cahen_catalogue_sceaux_t1.pdf
- et répertoriés dans l'inventaire de Natalis de Wailly (1843),
Sur une collection de sceaux des rois et des reines de France. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1843, tome 4. pp. 484-485.
doi : 10.3406/bec.1843.451718
https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1843_num_4_1_451718
ainsi que les illustrations de leur empreinte disponibles sur (le très opaque et académiste) sigilla.org, permettront dans un premier temps, de faire l'inventaire des documents disponibles permettant de désigner le premier Roi de France.
L'inventaire de sigilla.org (confusionniste, trop souvent inaccessible et capable d'étranges imprécisions) présente une première catégorisation historique distinguant les Rois des Francs des Rois de France, et qui reprend la catégorisation la plus largement répandue. Cette catégorisation s'appuie sur un changement dans les coutumes de l'hérédité royale :
Les différents royaumes francs
Le partage de 561 à la mort de Clotaire Ier -fils de Clovis-
qui avait réunifié le royaume de Clovis.
http://en.moselle.free.fr/Histoire/austrasie.htm
Roi des Francs (Mérovingiens et Carolingiens + Hugues Capet)
http://www.sigilla.org/roi-francs-170
Alors que la tradition chez les deux premières dynasties, voudrait que tous les fils héritent d'une partie du royaume du père, à partir du règne de Robert le pieux (997), fils d'Hugues Capet, un héritier unique monte sur le trône du royaume qui n'est plus divisé entre les frères. Ainsi ce domaine royal, nouvellement placé en indivision, devient cet embryon territorial servant de support à l'appellation royaume de France exigeant son Roi unique .
Les premiers Capétiens firent élire et sacrer leurs fils aînés de leur vivant. Philippe Auguste s’en dispensa ; lorsque son fils Louis -VIII, dit le lion - lui succéda après sa mort en 1223, l’hérédité gagna le statut de coutume légale faisant partie des lois fondamentales. Cette origine élective était symboliquement rappelée lors du sacre des rois de France lorsque les pairs soutenaient la couronne avant que la tête du roi n'en fût ceinte.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Monarchie_%C3%A9lective
Le domaine royal et les vassaux
Roi de France (Capétiens - Hugues Capet)
http://www.sigilla.org/roi-france-15018
http://www.cartesfrance.fr/histoire/cartes-royaume-francs/
Nous vérifierons dans quelle mesure l'inventaire méthodique établi par Natalis de Wailly confirme ou infirme le "roman national" (la doxa) repris par la catégorisation impliquant l'apparition d'un Roi de France dès la naissance de la dynastie capétienne.
On trouvera des indications et des précisions complémentaires sur les collections de sceaux dans les ouvrages suivants :
- Natalis de Wailly. Éléments de paléographie, tome 2, Paris, Imprimerie royale, 1838
https://archive.org/details/lmentsdepalograp02wail/page/n5/mode/2up?view=theater
- Nouveau traité de Diplomatique. Religieux de la congrégation de St. Maur. 1759
https://books.google.cz/
- Inventaires et documents - Collection des sceaux. Douët d'Arcq. 1863
https://books.google.cz
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Les Mérovingiens
Pour Eudes de Mézeray,
François Eudes de Mézeray - Abrégé chronologique de l'histoire de France, Volume 1 - 1673
https://books.google.cz/books?
c'est Faramond (418 - certains auteurs place le début de son règne en 420), qui inaugure la dynastie mérovingienne. Il est suivi par Clodion (428), Mérovée (448), Childéric (458) et Clovis, sacré roi en 481 (- / 508?).
Le supposé Clovis:
Le roi Clovis monté sur le throne, jetta des fondemens plus solides de la grandeur de cette couronne : à l’aide des troubles de l’empire, secondé de son courage & de la valeur de sa nation, & plus encore à la faveur du Christianisme qu’il embrassa, il devint maître d’abord des provinces qui étoient demeurées sous l’obéissance des Romains, ensuite des provinces confédérées qui s’en étoient soustraites, & chassa les Ostrogots. Clovis devenu ainsi le souverain des Gaules, entra aussitôt en possession des droits de ceux qui en étoient les maîtres avant lui, & de tout ce dont y joüissoient les Romains.
Encyclopédie. Article Domaine.1751
https://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Encyclop%C3%A9die/1re_%C3%A9dition/DOMAINE
Grâce à son baptême, Clovis devient le premier Roi "catholique" des Francs ( "catholique" est un anachronisme, il faut attendre le schisme de 1054. Clovis était certainement déjà chrétien avant sa conversion à la doctrine nicéenne, trinitaire - comme tous les peuples "barbares" des invasions, les Francs et Clovis avant sa conversion, étaient certainement chrétiens ariens - unitariens. Le roman national le prétend païen.) Les documents textuels semblent le désigner comme un Consul ou un Patrice romain nommé par l'empereur Anastase Ier. La littérature peut éventuellement le désigner comme Rex Bellorum. La légende Rex Francorum est une apparition attestée tardive.
Mais, tout ce que l'on peut savoir de Clovis est bien postérieur à son règne : " on sait qu'il ne nous reste de Clovis aucun acte sincère qui viendrait tant soi peu éclairer l'histoire de son règne : triste constat que l'on peut étendre à l'ensemble du VIème siècle mérovingien, dont les rois pas plus que leur homologues lombards, ne nous ont laissé un seul acte qui ne soit une forgerie."
Carlrichard Brülh. Clovis chez les faussaires. Bibliothèque de l'École des chartes. Vol. 154, No. 1, CLOVIS CHEZ LES HISTORIENS (janvier-juin 1996), pp. 219-240
https://www.jstor.org/stable/43013434
L'inventaire des sceaux royaux de Natalis de Wailly évoque de premiers réputés mérovingiens, mais sans jamais citer Clovis :
Clovis Ier n'apparait non plus nommément dans la chronique de Marius d'Avenches. Même si l'évêque de Lausanne n'ignore pas l'existence d'un royaume des Francs en 500, c'est Clodomir (+524) qui reçoit l'honneur d'être nommé le premier.
Et si Sigilla.org établit une fiche au nom de Clovis Ier, c'est uniquement pour indiquer que "
Sceau de forme, dimensions, dessin et légende inconnus.
Sceau attesté par une mention dans le Liber historiae Francorum,
édit. B. Krusch, dans Monumenta Germanica Historiae, Scriptores rerum merovingicarum, 1888, t. 2, p. 257.
http://www.sigilla.org/sceau-type/clovis-ier-sceau-29347
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D'une manière générale, l'origine de l'histoire de France reste "incertaine", à l'image des Grandes chroniques de France de l'abbaye de Saint-Denis:
1274 (1274 ?) (Information incertaine) (Source : Initiale) (Information incertaine)
https://portail.biblissima.fr/ark:/43093/mdatab556ccf39ba42ab7f5eeb6bd7675f94551e16d7a
Quant aux traces archéologiques, en général les académiciens admettent qu'elles restent de l'ordre du probable (incroyables et très opportunes découvertes, reconstructions et destructions définitives, disparitions mystérieuses...rien de plus romanesque que l'archéologie mérovingienne...)
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L'empereur byzantin comme modèle des attributs royaux (les régalia)
Solidus de Justinien (527-565), Constantinople.
D N IVSTINIANVS P P AVG
D (-ominus) N (-oster) Justinianus P (-ater) P (-atriae) Aug (-ustus) :
"Notre seigneur Justinien, père de la patrie, auguste"
https://fr.numista.com/catalogue/pieces120628.html
- Childéric Ier (CHILDIRICI REGIS , roi des Francs saliens et gouverneur romain de la province de Belgique seconde, réputé fils de Mérovée et père de Clovis, meurt en 481 - anneau sigillaire découvert à Tournai en 1653)
Buste du roi, vu de face, les cheveux longs jusqu'aux épaules, partagés par une raie médiane. Il est cuirassé, le paludamentum (manteau de couleur pourpre des empereurs) sur l'épaule gauche, et tient une lance de la main droite. Inscription : « Childerici Regis ».
https://fr.wikipedia.org/wiki/Child%C3%A9ric_Ier
http://www.sigilla.org/sceau-type/childeric-ier-roi-francs-sceau-27678)
- Sigebert II (S.R. - Sigebertus Rex - anneau sigillaire, "les deux sigles sont séparés par la tête du roi vue de trois quarts") sans date ni titre. Il est répertorié en tant que Sigebert III (fils de Dagobert Ier et roi d'Austrasie et des Burgondes vers 650, premier roi "fait néant") sur Sigilla.org
- http://www.sigilla.org/moulage/douet-arcq-3-29408
Le premier Rex Francorum apparait en 680 :
Thierry III : (THEU)DERICUS REX FR(ANC.)
Theudericus = Théodoric (Goth) = Thierry (Franc)
L'inventaire de Sigilla.org confirme l'apparition du titre REX FRANCORUM vers 690 (même si la légende du sceau est plus restreinte que celle consultée par Natalis de Wailly)
[THEVDERI] CVS REX [FRANCORVM]
http://www.sigilla.org/sceau-type/thierry-iii-sceau-29401
Dans l'abrégé chronologique de Mézeray, le roi Thierry (674) est le premier du nom, il est réputé roi de Neustrie, puis de tous les Francs (un Thierry II aurait régné vers 722)
+ CH [ ildebert ] REX FRACORVM
http://www.sigilla.org/moulage/douet-arcq-7-29438
Chilpéric II (roi de Neustrie et des Burgondes, puis de tous les Francs) constitue le dernier représentant de cette catégorie REX FRANCORUM, composée seulement de quatre exemples dans l'inventaire de Natalis de Wailly (Thierry III -680, Clovis III -693,
[____] OVIVS REX F [________]
http://www.sigilla.org/moulage/douet-arcq-5-29421
Childebert III -709 (roi d'Austrasie), Chilpéric II -716. / L'inventaire de Douët d'Arcq recense sept Mérovingiens : Childéric Ier, Dagobert Ier- référencé comme Dagobert II (roi d'Austrasie) par Sigilla.com qui propose "un moulage à partir d'une matrice en bronze aujourd'hui disparue" -,
DAGOBERTVZ REX FRANCORVM
Sigerbert II, Thierry III, Clovis III (roi d'Austrasie, déchu en tant qu'imposteur), Childebert III, Chilpéric II - Dagobert II et Clovis III prolonge la liste des Rex Francorum, le style, tête de face, cheveux longs correspond)
Chilpéric II
http://www.sigilla.org/moulage/douet-arcq-10-29527
La série des Rex Francorum présente une forte cohérence de style : une tête à longs cheveux, vue de face. On observe parfois des croix latines (Childebert.) Mais le style typiquement byzantin, clairement identifiable à l'époque de leur ancêtre Childéric, a disparu.
Ce style des sceaux mérovingiens se retrouve dans des monétaires plus récents :
Urraque Ire, née en 1081 et morte le 8 mars 1126 à Saldaña,
reine de León et Castille de 1109 à sa mort.
Philippe II Auguste, Francorum Rex (1180-1223), Denier (1180-1201, Laon)
Le supposé Childéric III, déposé par Pépin le Bref en 751 - Le dernier des Rex Francorum
Le dernier des Mérovingiens - 1883 - Évariste-Vital Luminais, Musée des Beaux-Arts de Carcassonne.
À l’exemple de la chevelure de Samson, la croyance en des pouvoirs surnaturels des cheveux a existé dans de multiples sociétés antiques et a perduré jusqu’à nos jours. Les anciens Égyptiens accordaient, eux aussi, une grande part de pouvoir, et donc, de magie, aux cheveux. Plusieurs rituels s’en font l’écho, de la mèche de jeunesse aux offrandes déposées dans les tombes.
Par Amandine Marshall, docteur en égyptologie
« Magie et pouvoir de la chevelure en Egypte ancienne », Archéologia 563, 2018, pp. 56-61.
https://www.academia.edu/36728910/_Magie_et_pouvoir_de_la_chevelure_en_Egypte_ancienne_Arch%C3%A9ologia_563_2018_pp_56_61
Chez les peuples barbares en particulier, les références à la chevelure sont précoces et abondantes. Tacite en parle déjà, et, par la suite, tant Grégoire de Tours pour les Mérovingiens que Paul Diacre pour les Lombards, décrivent des scènes et des pratiques précises en lien avec la chevelure. Chez les rois mérovingiens proprement dits, ceux-là même que Grégoire de Tours appelle « rois chevelus », la chevelure est un élément important, attribut nécessaire (et qui doit rester visible), du pouvoir. Elle leur permet de plus de s’inscrire dans la tradition des rois de l’Ancien Testament, comme l’explique Régine Le Jan. Les anecdotes relatives aux cheveux ne manquent pas dans les chroniques de l’époque mérovingienne. On connaît l’épisode au cours duquel la reine Clotilde déclare, à propos de ses petits-fils, qu’elle préfère les voir morts que tondus. On sait aussi que le dernier roi mérovingien, Childéric III, est tondu avant d’être déposé avec l’accord du pape Zacharie par Pépin le Bref en 751. La pratique de la « tonsure politique », dont le but est d’anéantir la possibilité pour un individu d’exercer le pouvoir, et ce de manière directement visible, est largement pratiquée chez les rois mérovingiens. Elle a été employée par exemple sur Thierry III, alors roi des Francs de Neustrie, ou le très jeune Dagobert II. À l’inverse, quand les Francs se cherchent, en 715, un nouveau roi, et qu’ils font sortir de son couvent le clerc Daniel, dont l’ascendance royale n’est pas prouvée, ils le rebaptisent Chilpéric, prénom dynastique, et attendent que ses cheveux aient repoussé pour le placer sur le trône.
Marie-Adélaïde Nielen. La découverte de poils ou cheveux humains dans les sceaux. Valeurs symboliques des éléments constitutifs des premiers sceaux royaux. 2018
https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01945219/document
Les Carolingiens
Sous la dynastie carolingienne, le dernier maire du palais, Pépin le Bref 752. "Pas de légende" chez Natalis de Wailly, qui décrit le sceau ainsi : "tête barbue, couronnée de pampre, vue de face. "
Sigilla.org fournit une légende : Pepinus Imperator
http://www.sigilla.org/moulage/lorraine-359-36806
Pourtant sa biographie désigne Pépin comme roi des Francs de Neustrie.
https://fr.wikipedia.org/Ppin_le_Bref
On observe le changement de style carolingien : tête de profil, cheveux courts.
Vers 750, le sceau de Constantin V et de son fils Léon IV. On reconnait le style byzantin, tête couronnée, de face, chevelure longue, globe crucigère.
https://collections.geneve.ch/mah/oeuvre/sceau-byzantin/cdn-044665
- Chez les carolingiens, les légendes sont très variées, les titres alternent entre REX et IMPERATOR et ne font pas toujours référence aux Francs.
Les sceaux et les représentations de Charlemagne ne lassent de surprendre par leur variété.
Le sceau du Roi des Francs :
XPE PROTEGE CAROLVM REGE FRANCR
porterait la figure d'un empereur romain du IIème siècle ?! (Antonin le pieux ou Commode d'après Sigilla.org) :
Buste de profil à droite d'un homme (Antonin le Pieux ou Commode ?) portant la barbe et les cheveux courts et bouclés ; il est revêtu du paludamentum.
http://www.sigilla.org/sceau-type/charlemagne-premier-sceau-29715
Le sceau de la période impériale ne porte aucune légende (anépigraphe) :
Tête de profil à gauche de Jupiter Sérapis, barbu et portant la coiffure en forme de modius.
http://www.sigilla.org/sceau-type/charlemagne-deuxieme-sceau-29731
CONSTAN-TINUS AVG
Constantin Ier (306-337), tête laurée à droite, Atelier : Arles
http://www.comptoir-des-monnaies.com/product_info.php/constantin-ier-nummus-cohen-454-p-60589
Denier impérial en argent de Charlemagne, inspiré des modèles romains. Au droit figure le profil imberbe et moustachu, le front ceint de lauriers, le buste couvert du paludamentum[1], et l'inscription « KAROLUS IMP[ERATOR] AUG[USTUS] »
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charlemagne#/media/Fichier:Charlemagne_denier_Mayence_812_814.jpg
L'atelier monétaire est identifiable : M. On semble admettre rapidement qu'il désigne Melle, dans le Poitou, atelier attenant à la mine d'argent. Pourtant, dans une étude consacrée aux "monnaies de Melle pendant le règne de Charles le chauve", les auteurs décrivent des monnaies dont la légende se réfère à l'atelier en toute lettres : METTVLO /-METTALVM. (On considère d'habitude que M désigne l'atelier de Toulouse, ici Melle dans les Deux-Sèvres (Poitou).)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ateliers_mon%C3%A9taires_fran%C3%A7ais
METTVLO apparait en toutes lettres sur le revers d'autres monnaies de Charlemagne (peut-être Charles le chauve):
CARLUS REX FR + METTVLO +
https://www.coinarchives.com/w/results.php?search=CARLVS+REX
La première apparition du Gratia Dei date de Charles le Chauve, 841/843 (KAROLUS MISERICORDIA DI IMPERATOR AVG - 877).
+ KAROLVS GRATIA DI. REX
Buste de profil à droite d'un homme imberbe, la tête ceinte d'une couronne de laurier nouée sur la nuque avec des rubans flottants. Il est revêtu du paludamentum attaché sur l'épaule droite.
http://www.sigilla.org/sceau-type/charles-ii-chauve-premier-sceau-29917
Le dernier carolingien, dont fait mention l'inventaire de Natalis de Wailly, est Charles le Simple : KAROLUS GRATIA DI. REX - 911.
Ces deux sceaux très semblables peuvent porter à confusion. "Malgré l'identité de la légende", Natalis de Wailly remarque que pour Charles le simple (+929), "la légende commence dans le bas à gauche; celle du sceau de Charles le chauve (+877) commence, au contraire, à droite, dans le haut : il est donc facile de distinguer ces deux types."
- Les Robertiens,
Eudes (888),
Tête de profil à droite d'un homme aux cheveux courts ceints d'un diadème.
Rodolphe (ou Raoul): RODULFUS GRATIA DI. REX 932 (bosonide : Tête laurée tournée à gauche. Il est d'abord Duc de Bourgogne avant d'être sacré Roi des Francs)
https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1988_num_43_3_283514
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Par FlyingPC — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=11633069
Les Capétiens
L'usage d'un titre unique redevient systématique en 997, sous Robert II (le Pieux), le premier des capétiens, qui épouse Berthe de Bourgogne.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_II_le_Pieux#Un_amour_pour_Berthe_de_Bourgogne_(996-1003)
A la différence de la première époque, le déterminant est antéposé: FRANCORUM REX
ROBERTUS GR(AT)IA DI. FRANCORU. REX. 997
https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1843_num_4_1_451718)
Un roi vu de face, à mi-corps, la tête ceinte d'une couronne à trois fleurons, la barbe longue. Le manteau, attaché sur l'épaule droite, retombe en pointe sur la poitrine. Il tient à la main droite un sceptre et à la gauche un globe.
http://www.sigilla.org/moulage/douet-arcq-31-30425
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Imperial Orb of the Holy Roman Empire, early 1600s.
(From The Kunsthistorisches Museum, Vienna).
Vers une histoire de la représentation du Globe terrestre
L'exemple du Jablko tchèque : c'est une pomme puisque la Terre était plate!
https://www.jerome-maurice-francis.cz/clanky/radio-paris-ment/ceci-n-est-pas-une-pomme--.html
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1056 - C'est Henri Ier,
futur époux d'Anne de Kiev,
à l'époque où Procope de Sázava était supposé rédiger l'Evangéliaire de Reims,
qui donnera l'ordre canonique DEI GRATIA FRANCORUM REX
Le roi est assis de face sur une banquette à deux étages d'arcatures, les pieds posés sur une estrade. Il porte une épaisse barbe et des cheveux courts ceints d'une couronne à trois pointes. Il est vêtu d'une longue dalmatique et d'un court manteau attaché sur l'épaule droite par un fermail rond et tombant en pointe sur la poitrine. De la main droite il tient un fleuron, de la main gauche un sceptre.
http://www.sigilla.org/sceau-type/henri-ier-roi-francs-premier-sceau-30429
L'illustration générale et le style de la légende que présente le sceau d'Henri Ier présente une forte cohérence avec les sceau d'Henri IV, roi des Romains et de Bourgogne (1050 -1106) :
HENRICUS DI GRA REX - A la différence d'Henri, on ne distingue pas de barbe. Il tient le globe crucigère. Sigilla.org ne fournit aucune date.
http://www.sigilla.org/moulage/lorraine-374-36821
HENRICUS DI GRA TERCI"U" ROMANORUM IMPERATOR AUG
Le globe et le sceptre sont inversés. Henri porte une moustache (1089).
https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_IV_(empereur_du_Saint-Empire)
En France, le trône aux lions apparait sous Louis VI (le gros, + 1137)
Le roi est assis sur un trône orné d'avant-corps de lions et posé sur une estrade.
http://www.sigilla.org/moulage/douet-arcq-35-30876
Sceau du roi Louis VII (le dernier roi des Francs ?)
Le roi est assis sur un trône en forme d’X orné d’avant-corps de lions et posé sur une estrade recouverte d’un tapis galonné. Il porte de longs cheveux ceints d’une couronne au large bandeau surmonté de trois fleurs de lis. Il est vêtu d’une dalmatique qui recouvre une longue tunique tombant jusqu’aux pieds et d’un manteau bordé d’un galon et attaché sur l’épaule droite par un fermail rond. De la main droite, il tient une fleur de lis et de la gauche un sceptre terminé par une fleur de lis dans un losange pommeté.
Natalis de Wailly, Éléments de paléographie, tome 2, Paris, Imprimerie royale, 1838, planche C, voir en ligne.
Le cas Hugues Capet
En se référant à une reproduction d'un dessin, tirée d'un ouvrage de 1681, les académistes de sigilla.org resteront fidèles à leur réputation d'usage de grossières catégorisations, refusant toute exactitude dans le processus de description. Ce manque de précision, en se faisant l'écho de rumeurs ou en assimilant d'étranges "copies" à des originaux, s'érige dorénavant en obstacle à la connaissance directe des documents.
La catégorisation utilisée par Sigilla.org présente Hugues Capet (décédé en 996) à la fois, comme premier FRANCORUM REX (adjectif antéposé), et dernier Roi des Francs. C'est Robert II, le FRANCORUM REX de 997, que la catégorisation de sigilla.org sacre premier Roi de France (alors que Robert II reste un Roi des Francs dans la catégorisation de Wikipédia. Avant la modification du 27 février 2022, Louis VII était présenté comme premier Roi de France par les rédacteurs du Wikipédia francophone (sans doute grâce à son mariage avec Aliénor d'Aquitaine)
L'aspect bande-dessinée de la reproduction du sceau d'Hugues Capet ne manque pas de surprendre:
+ HVGO DEI MISERICORDIA FRANC(o)R(um) R(ex)
De Re Diplomatica, 1681, p.421, pl. XXXVIII n°1
http://www.sigilla.org/dessin/hugues-capet-mabillon-11435
L'Encyclopédie méthodique (Histoire, tome II, article Duc. P. 379) présente l'ancêtre des Capétiens comme un sécessionniste :
"Par la faiblesse des rois, les duc et gouverneurs de provinces se firent souverains des provinces confiées à leur administration. Ce changement arriva principalement sur la fin de la seconde race, quand les grands seigneurs commencèrent à démembrer le royaume, de manière que Hugues Capet trouva chez les François plus de compétiteurs que de sujets. "
Une trame narrative impliquant un coup d'état des maires des Palais devait déjà expliquer la disparition de la première race et de ses rois "fainéants."
Pendant la période mérovingienne, les maires du palais1, parfois préfets du palais, étaient les plus hauts dignitaires des royaumes francs, après les rois. À l'origine simples intendants du roi dans son palais, ils vont progressivement étendre leur pouvoir et leurs fonctions, à partir du viie siècle, jusqu'à se trouver en mesure de déposer les rois.
En 751, Pépin le Bref dépose le dernier roi mérovingien, Childéric III, et se fait reconnaitre comme souverain du royaume franc par le pape Zacharie et fonde ainsi la dynastie carolingienne.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Maire_du_palais
En plus de constituer une trame historique déjà reconnaissable dans les événements de l'anarchie militaire, elle correspond aussi à la description de l'événement de la "chute de Rome." Une fois purgé de la notion trop simple "d'invasions barbares", cet événement se décrit aussi comme une sécession des diocèses ariens.
Les nouveaux royaumes "barbares" reprennent les frontières des diocèses de Dioclétien (-300) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Roman_Empire_with_dioceses_in_300_AD.png -
Contrairement à l'aspect de mosaïque chaotique que présente l'Angleterre après les invasions (+500) : https://www.euratlas.net/history/europe/500/fr_500_nord-ouest.html
On ne peut s'empêcher de remarquer la même façon sécessioniste, qui fit des provinces de l'empire Romain des contrées musulmanes.
L'histoire méconnue de l'Islam en Gaule (VIIIe-Xe siècle) - La Gaule arabo-berbère de l'émirat de Narbonne à La Garde Freinet
La période de "la Gaule musulmane" ou "la Gaule arabo-berbère" a duré de 719 à 972, soit avec des périodes d'interruption ou d'incertitude, 253 ans de gouvernance musulmane (dont le siège était d'abord à Narbonne, puis finalement dans la base fortifiée de la Garde-Freinet, sans compter le maintien de communautés musulmanes, notamment à Montpellier jusqu'au 12e siècle. Cette période est donc presque complètement occultée dans les manuels scolaires.
On y passe totalement sous silence que le Sud de la Gaule (des Pyrénées aux Alpes) fut gouverné par des musulmans durant plus de deux siècles. Pépin le Bref prit certes Narbonne aux Musulmans en 759 mais ne parvint pas à détruire l'Islam en Gaule : jusqu'à la fin du 10e siècle, une partie de la côte méditerranéenne resta musulmane, avec pour place forte la Garde Freinet (dans le Fraxinet) près de l'actuel Saint-Tropez.
Et le dernier bastion musulman fut le massif des Maures. La Gaule méridionale musulmane était politiquement rattachée à l'Emirat (puis au Califat) de Cordoue. Sa chute fut le prélude de la Reconquista catholique en Espagne et des Croisades en Orient et en Afrique.
https://www.decitre.fr/livres/l-histoire-meconnue-de-l-islam-en-gaule-viiie-xe-siecle-9782914566810.html
735 - Le duc de Marseille se rallie au Califat des Omeyyades.
En ou avant 7363, il appelle à l'aide le Sarrasin Yusuf ibn 'Abd al-Rahman al-Fihri, wali de Narbonne, pour défendre Avignon4 bien que certains indiquent que la cité fut prise ainsi que celle Arles. D'autres sources placent ces évènements après 736. Cette année-là, Charles Martel envahit la vallée du Rhône avec son demi-frère Childebrand et dévaste la région, reprenant Arles et Avignon et repoussant Mauronte dans Marseille. À partir de cette cité, le patrice et ses alliés se rebellent à nouveau en 737 puis en 7395, mais Childebrand, aidé de Charles Martel et renforcé par les Lombards remporte une victoire décisive près d'Avignon6 et force Mauronte à se réfugier dans les Alpes.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Mauronte
Roman d'Aquin - La conqueste de la Bretaigne armoricque par le roy Charlemaigne
Cy ensuit le discours d'une conqueste du royaulme de Bretaigne Armoricque, faicte par le preux Charlemaigne roy de France, avant son coronement à l'empire environ dix ou douze ans, contre un roy sarazin nommé Acquin qui habvaoit possédé le dit réaulme par l'espace de XXXans.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81586s/f132.image#
574. 8e année du consulat de Justin II Auguste, 7e indiction.
Cette année-ci, les Lombards entrèrent une seconde fois dans le Valais et ils s'emparèrent des Cluses et séjournèrent longtemps dans le monastère des saints d'Agaune et après, ils engagèrent le combat à Bex avec l'armée des Francs où ils furent presque tous tués jusqu'au dernier. Quelques-uns se sauvèrent par la fuite. Les Maures et autres peuples, qui voulurent envahir la Provence, furent défaits par les Francs.
http://remacle.org/bloodwolf/historiens/marius/chroniques.htm
Dans leur Recueil général des anciennes lois françaises depuis l'an 420 jusqu'à la révolution de 1789, les auteurs présente Hugues Capet comme un usurpateur. Ils n'omettent pas l'occasion de rappeler l'absence de document législatif : " Un savant nous a dit avoir vu des Chartes de cette époque, datées de différentes années de l'usurpation de Hugues, duc de France."
JOURDAN, DECRUSY et ISAMBERT, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420...Paris. 1821. Tome I, préface p.LXII
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65212800?rk=42918;4
Le Duc Hugues Capet (Dux Aquitanorum), dont on ne possède aucune empreinte positive de sceau royal, est effectivement absent de l'inventaire de Natalis de Wailly.
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Du Rex Francorum au Roi de France - I.bis
Roman national et documents sigillaires. Le cas de Philippe II Auguste.
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Première mise en ligne : 9.10.2022